Une étude nationale explore les causes physiopathologiques du COVID long
Dernière mise à jour le 10 juin 2025
Alors que les conséquences à long terme du COVID-19 sévère sont bien documentées, les mécanismes à l’origine des symptômes persistants après une forme légère de la maladie restent encore largement méconnus. Des chercheurs de l’Institut Pierre Louis d’Epidémiologie et de Santé Publique (IPLESP), laboratoire de recherches de Sorbonne Université et de l’Inserm, dans une étude coordonnée par l’ANRS Maladies infectieuses émergentes (ANRS MIE), présentent les résultats de l’étude COPER. Cette étude apporte un éclairage inédit sur les liens entre les séquelles persistantes du COVID-19 (connues sous le nom de PASC – Post-Acute Sequelae of COVID-19– ou de COVID long) et des anomalies immuno- inflammatoires chez des patients non hospitalisés. L’étude révèle des relations complexes entre les variations de certains biomarqueurs, les types de symptômes persistants et le temps écoulés depuis l’infection. Ce projet a été labellisé comme Priorité Nationale de Recherche par le Comité d’Orientation Stratégique sur les essais cliniques et autres recherches sur la COVID-19 (CAPNET), et financé par le ministère de la Santé et de la Prévention ainsi que le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation. Ces travaux sont publiés dans la revue eBioMedicine, le 1er juin 2025.
Les séquelles persistantes du COVID-19, neurologiques, cardiovasculaires ou respiratoires, connues sous le nom de PASC (Post-Acute Sequelae of COVID-19), ne concernent pas uniquement les formes graves. Fin 2022, une revue critique de la littérature scientifique a mis en lumière les nombreuses hypothèses explorées pour expliquer le COVID long : persistance virale, dérèglement immunitaire, inflammation chronique, dysfonction endothéliale, troubles de la coagulation, auto-immunité ou encore atteinte mitochondriale. Si certains travaux soutiennent ces pistes grâce à des biomarqueurs (IL-6, IFNγ, TNF-α, etc.), de nombreuses limites méthodologiques ont été relevées : effectifs réduits, absence de groupes témoins, manque d’ajustement statistique, et surtout exclusion fréquente des patients non hospitalisés — alors qu’ils constituent la majorité des cas de COVID long.
L’étude COPER, lancée en 2022 émet l’hypothèse que la variabilité des symptômes cliniques peut être attribuée à plusieurs mécanismes sous-jacents. Pour étudier cette hypothèse, une cohorte suffisamment importante a été constituée pour examiner les symptômes, les biomarqueurs et leur évolution au fil du temps.
Entre juin et novembre 2022, 1000 participants issus des cohortes en population générale (CONSTANCE, E3N-generation, Nutrinet-Santé) ont été inclus. Au total, 801 participants ont été inclus dans ce premier travail et répartis en deux groupes : un groupe de personnes totalement rétablies d’une infection par le SARS-COV-2 (n = 490) et un groupe souffrant encore de symptômes persistants (n = 311), tels que fatigue, essoufflement, toux ou troubles du sommeil. Aucun participant n’a été hospitalisé. L’objectif de l’étude était de mieux comprendre les mécanismes biologiques sous-jacents aux symptômes persistants observés après une infection par le SARS-CoV-2 chez des patients non hospitalisés.
Les analyses biologiques menées lors de deux visites à domicile à six mois d’intervalle ont révélé des associations significatives entre certains biomarqueurs sanguins et les symptômes persistants, notamment les biomarqueurs liés à l’activation virale, à la gravité du COVID-19 ou encore à l’inflammation vasculaire. Toutefois, ces anomalies ne semblent pas durer dans le temps, suggérant le caractère transitoire de certains mécanismes.
Une des conclusions de l’étude est que l’étude des marqueurs inflammatoires est probablement insuffisante pour discriminer les personnes souffrant de COVID long. Des études utilisant une méthodologie similaire et prenant en compte d’autres biomarqueurs doivent être réalisées
Au-delà de la réussite logistique que représente la mise en œuvre d’une telle étude — incluant la collaboration entre différentes cohortes, l’organisation de visites à domicile et l’acheminement d’échantillons depuis l’ensemble du territoire français — cette première publication issue de cette cohorte souligne l’hétérogénéité clinique et biologique du COVID long, ainsi que l’influence du temps écoulé depuis l’infection sur les biomarqueurs analysés.
Elle souligne l’importance de réaliser des études « multi-omiques »c’est à dire une approche intégrée combinant plusieurs types de données (génomique, transcriptomique, protéomique, métabolomique, etc.) pour obtenir une vision globale et multidimensionnelle des processus potentiellement impliqués dans les syndromes post infectieux. Ce type d’étude nécessite des financements conséquents. Un dispositif de ce type et la méthodologie utilisée pourraient s’appliquer à l’étude de symptômes persistants survenant après d’autres infections dans le cadre d’épidémies et d’émergences de nouveaux agents pathogènes se diffusant dans la population générale.
Les premiers essais thérapeutiques sont assez décevants en termes de prise en charge médicamenteuse, peut être par l’hétérogénéité des patients inclus. Notre étude suggère que la recherche thérapeutique devra prendre en compte au minimum les symptômes et le temps depuis l’infection pour créer des groupes d’études les plus homogènes possibles. On va vers une médecine personnalisée ou de précision.
L’ANRS Maladies infectieuses émergentes est une agence autonome de l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale). Ses missions sont de faciliter, évaluer, coordonner et financer la recherche sur le VIH/sida, les hépatites virales, les infections sexuellement transmissibles, la tuberculose, et les maladies infectieuses émergentes et ré-émergentes.
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