ANRS DOXYVAC : Le déploiement rapide de la vaccination antivariolique permet de réduire le risque de mpox

Dernière mise à jour le 22 août 2024

L’essentiel

L’essai ANRS DOXYVAC, promu et financé par l’ANRS Maladies infectieuses émergentes, et mené par des équipes de recherche de l’Inserm, de l’AP-HP, de l’Université Paris Cité et de Sorbonne Université, montre que le déploiement rapide d’une vaccination antivariolique par le MVA-BN (Modified vaccine Ankara) parmi les hommes non infectés par le VIH ayant des rapports sexuels avec des hommes permet de fortement réduire le risque de mpox, avec une réduction de l’incidence estimée à 99 %. Les résultats de cette étude ont fait l’objet d’une publication dans la revue The Lancet Regional Health-Europe du 31 juillet 2024.1

DOXYVAC dans le contexte de l’épidémie de mpox de 2022

En mai 2022, des cas de mpox, anciennement appelé « variole du singe » ou « monkeypox« , ont été signalés dans plus de 100 pays où la maladie n’était pas endémique. En France, le premier cas a été reporté le 19 mai, avec une augmentation rapide des infections chez les hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes (HSH).

L’essai ANRS DOXYVAC, débuté en 2021, visait à améliorer la protection contre les infections sexuellement transmissibles (IST) chez les hommes non infectés par le VIH ayant des rapports sexuels avec des hommes.* Aussi, lorsqu’au cours de cette étude il est apparu que des cas de mpox pouvaient survenir dans la population de l’essai, une vaccination antivariolique a été réalisée, répondant ainsi aux recommandations du 11 juillet 2022 de la Haute Autorité de santé (HAS) de procéder à une vaccination préventive chez les HSH, ayant des partenaires sexuels multiples.

Le vaccin antivariolique utilisé dans DOXYVAC

À ce jour, il n’y a pas de vaccin spécifique contre mpox. Toutefois, le virus est très apparenté à celui de la variole humaine, et on a montré que le vaccin antivariolique avait une efficacité de protection de plus de 95 % contre la mpox.1 Le vaccin utilisé dans l’essai, Imvanex® (MVA-BN : Modified vaccine Ankara) du laboratoire Bavarian Nordic, est un vaccin de troisième génération. Ce type de vaccin est produit à partir du virus de la variole présentant les mêmes antigènes que la variole historique. Plus précisément, il contient une forme hautement atténuée du virus de la vaccine appelée « virus modifié de la vaccine Ankara », un virus qui ne provoque pas de maladie chez l’homme et ne peut pas se reproduire dans les cellules humaines des sujets vaccinés. Ce vaccin ne peut donc pas provoquer d’infections locales ou généralisées, en particulier chez les personnes immunodéprimées (comme les personnes infectées par le VIH, par exemple).

Objectif de l’étude

Le but de l’étude élargie à la prévention contre mpox était d’évaluer l’incidence de l’infection à mpox chez les participants avant (9 mai-10 juillet 2022) et après le lancement de la campagne de vaccination MVA-BN (à partir du 11 juillet 2022), et d’étudier les effets respectifs de la vaccination et des comportements sexuels adoptés pendant la période épidémique sur l’évolution de l’incidence.

Résultats de l’analyse

Parmi les 472 participants inclus dans l’analyse, 20 % avaient été vaccinés contre la variole durant leur enfance. Le taux d’incidence** de mpox chez les participants de l’essai, qui étaient tous sous prophylaxie pré-exposition (PrEP) contre le VIH et qui avaient tous des antécédents d’IST bactériennes, était élevé (49,3 pour 1 000 participants-mois entre le 9 mai et le 20 septembre 2022).

La mise en place de la vaccination a été rapide : 86 % (341/398) des participants admissibles avaient reçu au moins une dose de vaccin MVA-BN au 20 septembre 2022. Les personnes ont également été particulièrement sensibles aux messages de prévention et aux recommandations, notamment celles qui, avec plus de dix partenaires sexuels au cours des trois derniers mois, sont les plus à risque. Leurs comportements sexuels ont ainsi significativement changé avant et après le 9 mai conduisant à une diminution de la proportion de personnes ayant plus de 10 partenaires dans les 3 derniers mois (45 % contre 38 %). Une diminution significative du taux d’incidence de mpox a pu être constatée entre la période précédant la vaccination (67,4 pour 1 000-mois entre le 9 mai et le 10 juillet 2022) et celle suivant le lancement de campagne de vaccination (24,4 pour 1 000-mois entre le 11 juillet et le 20 septembre 2022).

Conclusion

Cet essai a démontré que la mise en place rapide d’une vaccination antivariolique par le MVA-BN chez les HSH sous PreP permet de fortement réduire le risque de mpox, avec une réduction de l’incidence estimée à 99 % entre les deux périodes. La diminution des comportements sexuels à risque chez les personnes les plus exposées a également probablement contribué à la réduction de l’incidence, mais dans une moindre mesure par rapport au programme de vaccination.

Cette étude souligne que l’identification et la priorisation des populations à risque, la délivrance de messages de prévention ciblés et de campagne de sensibilisation, la disponibilité d’un vaccin antivariolique et surtout le déploiement rapide de la vaccination chez les personnes à risque devraient permettre aux autorités de santé de contrôler à l’avenir une épidémie de mpox comme celle survenue en 2022.

* DOXYVAC a montré l’efficacité de la doxycycline en post-exposition pour réduire la survenue des infections à chlamydia, de la syphilis et à un moindre degré des infections à gonocoques.

** L’incidence est le nombre de cas apparus pendant une année au sein d’une population (à ne pas confondre avec la prévalence, qui désigne la proportion de personnes malades à un moment donné). Le taux d’incidence correspond au nombre d’individus ayant contracté une maladie pour 1 000 personnes exposées au risque de cette maladie (dans l’essai DOXYVAC, il est calculé pour un mois) (https://www.ined.fr/fr/lexique/incidence-d-une-maladie/).

Référence

  1. Jade Ghosn (1,2), Lambert Assoumou (3), Moussa Ouattara (3), Emma Rubenstein (4), Gilles Pialoux (5), Christine Katlama (3,6), Laure Surgers (3,7), Claudine Duvivier (8,9,10), Juliette Pavie (11), Jean-Paul Viard (11), Michèle Algarte-Genin (3), Severine Gibowski (12), Manon Ollivier (12), Dominique Costagliola (3) and Jean-Michel Molinad (4,13). Impact of vaccination with third generationmodified vaccinia Ankara and sexual behaviour on mpox incidence in men who have sex with men: analysis among participants of the ANRS-174 DOXYVAC trial. The Lancet Regional Health – Europe 2024;45: 101020

 

  1. Assistance Publique-Hôpitaux de Paris.Nord, Hôpital Bichat-Claude Bernard, Service des Maladies Infectieuses et Tropicales, Paris F75018, France
  2. Université Paris Cité, INSERM, UMRS 1137 IAME, Paris F75018, France
  3. Sorbonne Université, INSERM, Institut Pierre Louis d’Épidémiologie et de Santé Publique, Paris F75012, France
  4. Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, Service des Maladies Infectieuses et Tropicales, Hôpital Saint-Louis, Paris F75010, France
  5. Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, Sorbonne Université, Service des Maladies Infectieuses et Tropicales, Hôpital Tenon, Paris F75020, France
  6. Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, Sorbonne Université, Service des Maladies Infectieuses et Tropicales, Hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris F75013, France
  7. Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, Sorbonne Université, Service des Maladies Infectieuses et Tropicales, Hôpital Saint-Antoine, Paris F75012, France
  8. Assistance Publique-Hôpitaux de Paris-Necker Hospital, Infectious Diseases Department, Necker-Pasteur Infectiology Center, Paris F75015, France
  9. Université Paris Cité, INSERM U1016, CNRS UMR8104, Institut Cochin, Paris, France
  10. IHU Imagine, Paris, France
  11. Assistance Publique-Hôpitaux de Paris-Centre, Unité de Thérapeutique en Immuno-Infectiologie, Hôpital Hôtel-Dieu, Paris F75004, France
  12. Agence Nationale de Recherche sur le SIDA et les Hépatites virales – Maladies Infectieuses et Émergentes (ANRS-MIE), Paris F75015, France
  13. Université Paris Cité, INSERM UMR 944, Paris F75010, France

À propos de l’ANRS MIE

L’ANRS Maladies infectieuses émergentes est une agence autonome de l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale). Ses missions sont de faciliter, évaluer, coordonner et financer la recherche sur le VIH/sida, les hépatites virales, les infections sexuellement transmissibles, la tuberculose, et les maladies infectieuses émergentes et ré-émergentes.

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