L’exploration du microbiote digestif est une technologie de plus en plus accessible aujourd’hui. De nombreuses données expérimentales chez l’animal et chez l’homme suggèrent qu’un dérèglement du microbiote intestinal (dysbiose) pourrait participer à un vieillissement plus précoce et à l’expression du phénotype de fragilité. Les Personnes vivant avec le VIH (PVVIH) présentent des marqueurs de fragilité phénotypique en moyenne 10 ans avant les personnes non infectées.
Chez les PVVIH des altérations anatomico-fonctionnelles du système lymphoïde associé au tube digestif surviennent très précocement après l’infection par le VIH, et peuvent persister malgré une suppression virologique sous ART. Ces altérations sont associées à une translocation microbienne (passage de microbes et/ou de produits microbiens de la lumière intestinale vers l’organisme en absence de bactériémie), qui elle, est corrélée à l’activation immunitaire et la dysbiose intestinale.
L’objectif de notre étude est d’explorer le microbiote intestinal chez des PVVIH sur une durée de 5 ans et d’étudier l’association de l’évolution du microbiote avec le phénotype de fragilité ainsi qu’avec le poids des comorbidités.
Objectif principal: Etude de l’évolution différentielle à 5 ans du microbiote intestinal entre les différents groupes des PVVIH classés en 3 catégories selon les marqueurs phénotypiques de fragilité : fragiles (3 ou plus), pré-fragiles (1 à 2), non fragile (0).
Objectifs secondaires:
- Etude de l’évolution différentielle du microbiote intestinal entre les différents groupes des PVVIH à 3 ans
- Etude annuelle de l’évolution du profil immunitaire en fonction du groupe de fragilité pendant 5 ans
- Etude de l’association entre microbiote intestinal et activation inflammatoire à 0, 3 et 5 ans dans les différents groupes de PVVIH
- Etude de l’association entre le microbiote intestinal et la présence d’une ou plusieurs comorbidités dans les différents groupes de PVVIH
METHODES:
Le modèle de Fried comprend cinq marqueurs de fragilité qui correspondent à 5 domaines : faiblesse de préhension (force), faible endurance (énergie), activité physique réduite (activité physique), vitesse de marche lente (mobilité) et perte de poids involontaire au cours de la dernière année (nutrition). La présence d’au moins trois de ces critères qualifie la «fragilité » tandis qu’un ou deux critères définissent la préfragilité.
Les selles des participants seront recueillis pour l’analyse du microbiote, à l’inclusion, puis tous les ans pour une durée de 5 ans. Chaque prélèvement de selles donnera lieu à une consultation avec une diététicienne (afin de renseigner les habitudes alimentaires du participant, et les éventuels changements dans les 15 jours précédant le recueil des selles), ainsi qu’une évaluation impédancemétrique.
- Nombre de sujets participants : 132 (44 PVVIH fragiles-44 PVVIH préfragiles- 44 PVVIH non fragiles)
- Durée des inclusions : 18 mois
- Durée de participation à l’étude: 5 ans
Des analyses multivariées exploratoires non supervisées (Analyse en Composantes Principales) et supervisées (Analyse Discriminante par Moindre Carrés Partiels), seront réalisées pour identifier des biomarqueurs et/ou faire ressortir une empreinte microbiote caractéristique du phénotype de fragilité ou de sa progression.
Tous les tests statistiques seront calculés en fonction du seuil de significativité α=0.05. Les analyses statistiques seront réalisées à l’aide du logiciel SAS V9.4 (SAS Institute Inc., Cary, NC).
RETOMBEES:
L’évolution longitudinale du microbiote intestinal pourrait être associée à une évolution des marqueurs de fragilité, par exemple vers un état plus fragile. Sachant que le phénotype de fragilité pourrait être un état réversible, les marqueurs identifiés pourraient permettre un dépistage plus précoce et une prise en charge des patients pré-fragiles et fragiles, ou ceux ayant un risque d’évolution vers ces phénotypes.