Publié le 27 juin 2023
La pandémie de Covid-19 a posé des problématiques jamais rencontrées jusque-là dans la recherche scientifique et la pharmacovigilance n’a pas été épargnée. Beaucoup de candidats médicaments et de médicaments existants ont été repositionnés afin de tester leur efficacité contre le virus au début de la pandémie.
A la suite des constats effectués lors de la gestion de la tolérance de l’essai clinique européen DisCoVeRy pendant la pandémie, le département de pharmacovigilance des recherches cliniques de l’ANRS relate son expérience et présente dans cet article publié le 11 juin dans la revue Pharmacology Research & Perspective les difficultés rencontrées, les obstacles surmontés, les leçons tirées et propose des recommandations permettant de mieux anticiper et préparer la pharmacovigilance en cas de prochaine épidémie.
L’essai DisCoVeRy est un essai européen promu par l’Inserm dans le cadre du consortium EU-RESPONSE. Il s’agit d’un essai de phase III ouvert, randomisé contrôlé et multicentrique conçu pour évaluer la sécurité et l’efficacité de quatre traitements expérimentaux contre la Covid-19 chez des patients adultes et hospitalisés. Il comporte cinq modalités de traitements et les patients ont été répartis au hasard dans l’un de ces cinq groupes :
Les premières inclusions dans l’essai DisCoVeRy ont débutées le 22 mars 2020, soit cinq jours après le premier confinement en France. Cette mesure sanitaire nécessaire dans la lutte contre le virus a toutefois eu un impact important sur le travail du département pharmacovigilance qui a dû, comme tous les secteurs, réorganiser ses activités et notamment suspendre le suivi des essais cliniques non Covid dans les hôpitaux.
Durant le suivi de cet essai, le département de pharmacovigilance a fait face à de nombreuses difficultés. Il a notamment dû prendre en charge 585 événements indésirables graves initiales (EIG) et gérer 396 rapports de suivi en 10 semaines. Dans contexte sanitaire exceptionnel, le département a également dû effectuer plus de 500 demandes d’informations complémentaires auprès des investigateurs pour corriger et/ou compléter les formulaires d’EIG reçus. En parallèle, les investigateurs, eux, étaient surchargés par la prise en charge des patients COVID positifs, la déclaration d’EIG, même si essentielle, semblait alors être une tâche administrative sans intérêt immédiat. Tout cela a rendu très difficile l’évaluation des EIG et notamment du facteur de causalité de chaque médicament expérimental.
Le département de pharmacovigilance rapporte également une charge de travail supplémentaire due au cadre légal et informatique non-adaptés à une situation de crise sanitaire. Afin de mieux préparer d’éventuelles pandémies à venir, le département de vigilance propose plusieurs pistes de réflexion et recommandations :
[1] L’eCRF (electronic Case Report Form) est un outil de saisie électronique des données utilisé dans le cadre des essais cliniques pour recueillir les informations.
L’essai DisCoVeRy est promu par le PRC Inserm avec les financements de la Commission européenne (EU-Response), du Ministère de la Santé et de la Prévention (Programme Hospitalier de Recherche Clinique), de DIM One Health Ile-de-France et de REACTing. Il a été soutenu par Gilead, Merck, Sanofi et Abbvie.
Cette étude a été labellisée Priorité Nationale de Recherche par le Comité ad-hoc de pilotage national des essais thérapeutiques et autres recherches sur le COVID-19 (CAPNET). Les auteurs remercient l’ANRS | Maladies infectieuses émergentes pour son soutien scientifique, le ministère de la Santé et de la Prévention et le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation pour leur financement et leur soutien.
Management of pharmacovigilance during the COVID-19 pandemic crisis by the safety department of an academic sponsor: Lessons learnt and challenges from the EU DisCoVeRy clinical trial
Noémie Mercier (1,2), Drifa Belhadi (3), Aline DeChanet (4), Christelle Delmas (5), Juliette Saillard (1), Marina Dumousseaux (5), Soizic Le Mestre (1), Claire Fougerou-Leurent (4), Assia Ferrane (5), Charles Burdet (3,6,7,3), Hélène Espérou (2), Florence Ader (8,9), Maya Hites (10), Nathan Peiffer-Smadja (7,11), Julien Poissy (12), Claire Andrejak (13), José Artur Paiva (14), Evelina Tacconelli (15), Thérèse Staub (16), Richard Greil (17), Dominique Costagliola (18), France Mentre (3,6,7), Yazdan Yazdanpanah (1,7,11), Alpha Diallo (1,2)