La réplication rétrovirale se déroule grâce à une étape obligatoire, l’intégration, qui est essentielle pour une expression génique virale efficace et garantit une ségrégation égale du matériel génétique du virus aux cellules filles après la division cellulaire. Bien que l’intégration rétrovirale se produise dans tout le génome humain, elle n’est pas entièrement aléatoire. Les lentivirus tels que le VIH, par exemple, ciblent de préférence les gènes actifs. Des recherches effectuées au cours des dernières années ont révélé que le facteur cellulaire associé à la chromatine, LEDGF/p75, et, plus récemment, le facteur nucléaire CPSF6 jouent un rôle dominant dans l’intégration du VIH dans les gènes actifs. Comme le VIH ne nécessite pas de division cellulaire pour pénétrer dans le noyau, l’ADN viral pour accéder à la chromatine rentre dans le noyau à travers le complexe de pores nucléaires (NPC).
Les NPC jouent un rôle important dans l’organisation de la chromatine 3D, ainsi que dans la régulation de l’expression des gènes cellulaires et, probablement, des gènes viraux. De plus, des études récentes, dont la nôtre, ont montré l’implication de certains Nups dans l’infection par le VIH. Récemment, nous avons montré que l’environnement de la chromatine à proximité des NPC favorisait la réplication virale. Plus récemment, nous avons publié une étude montrant qu’un autre facteur nucléaire, le CPSF6, joue un rôle important dans la sélection des sites d’intégration dans la chromatine active et dans les régions à majeur densité génique. Cependant il est possible que Nups et CPSF6 coopèrent pour autoriser une réplication efficace du VIH.
Des études sur différents parasites qui s’intègrent en permanence dans le génome de l’hôte montrent qu’ils ont évolué pour cibler la chromatine de manière à optimiser leur coexistence avec les hôtes et à favoriser la libération de nouveaux descendants viraux. En revanche, les lymphocytes T infectés par le VIH-1 ne survivent généralement qu’un jour ou deux avant d’être tués par le système immunitaire cellulaire ou par la toxicité de l’infection. Ainsi, le VIH doit libérer des taux élevés de virus dans les quelques jours suivant l’infection. L’intégration virale dans les gènes actifs est généralement favorable à une transcription efficace expliquant potentiellement la préférence de ciblage. Cependant, le VIH peut également coexister pendant des périodes prolongées en tant que chimère dans le génome de patients infectés comme virus latent. Par conséquent, les mécanismes sous-jacents à ce phénomène sont encore à l’étude et il est fort possible que les facteurs de chromatine associés aux protéines d’entrée nucléaire puissent jouer un rôle critique sur la persistance du VIH dans les cellules infectées.
Dans notre laboratoire, nous avons récemment mis au point un nouvel outil d’imagerie qui peut permettre de visualiser en temps réel l’ADN viral une fois retrotranscrit jusqu’à son intégration dans la chromatine de la cellule hôte. Cette technologie révolutionnaire sera l’occasion d’élucider la dynamique de l’interaction entre le génome de l’ADN viral et les facteurs de l’hôte ou d’identifier les sites de la chromatine impliqués dans la transcription ou la latence virale.
Dans le projet proposé, nous explorerons le lien entre le NPC et les sites d’intégration du VIH pour caractériser le rôle intrigant et inconnu des nucléoporines, des facteurs nucléaires et des «topologically chromatin associating domains» ou des régions régulatrices comme les « super enhancers » pour orchestrer la transcription virale.