La fièvre hémorragique de Crimée-Congo est transmise par le virus FHCC. Cette transmission peut se faire par des piqûres de tiques, par contact avec des fluides ou liquides biologiques.
Dernière mise à jour le 06 novembre 2025
Les premières descriptions d’un syndrome hémorragique potentiellement causé par des tiques remontent au XIIe siècle au Tadjikistan.1 En 1944-45, une infection inconnue jusqu’alors en Crimée affecta quelques 200 militaires. En 1956, la « fièvre hémorragique Crimée » fut associée au virus isolé à partir d’un patient au Congo belge (l’actuelle République démocratique du Congo).1 Avant 1970, la plupart des cas provenaient de l’ex- Union soviétique et de pays d’Afrique comme la RDC, l’Ouganda, la Mauritanie, le Burkina Faso, la Tanzanie et le Sénégal.1 Une épidémie avait eu lieu cependant en Chine en 1965 avec un taux de mortalité de 80 %.1 Des cas ont été également signalés au Moyen-Orient.1
La FHCC est, en fait, endémique en Afrique, dans les Balkans, au Moyen-Orient et en Asie, dans les pays en deçà du 50e degré de latitude nord.2
Elle est la seule fièvre hémorragique virale endémique en Europe.3 On la trouve en Bulgarie depuis les années 1950, où une importante épidémie s’était déclarée entre 1954 et 1955, avec 487 cas signalés. Des cas ont également été signalés dans les pays voisins, notamment en Albanie, au Kosovo, en Turquie et en Ukraine.3 Le premier cas local en Grèce a été signalé en 2008, alors que le premier cas local en Europe occidentale l’a été en Espagne en août 2016.3 Les cas importés en Europe occidentale sont rares : un cas importé du Zimbabwe au Royaume-Uni en 1998 ; un cas importé de Bulgarie en Allemagne en 2001 ; et un cas importé du Sénégal en France en 2004.4
En 2022, l’Union européenne a enregistré quatre cas de FHCC, dont deux mortels. Aucun cas n’a été signalé en 2023, mais en 2024, l’Espagne a enregistré un cas mortel de FHCC.5
La FHCC est sous surveillance en France depuis 2015. En octobre 2023, elle a été détectée pour la première fois dans des tiques de l’espèce Hyalomma marginatum collectées sur des bovins dans les Pyrénées-Orientales et en Corse.6 Ayant une appétence pour un climat sec et chaud, cette tique a été retrouvée de la frontière espagnole à la frontière italienne (Pyrénées Orientales, Aude, Hérault, Gard, Ardèche, Drôme, Bouches-du-Rhône, Var, Alpes-Maritimes). Le risque de contamination est donc démontré dans le sud de la France. À ce jour, aucun cas humain n’a été diagnostiqué en France.6-8
Les flambées de fièvre hémorragique de Crimée-Congo ont un taux de létalité pouvant atteindre 40 %.2
La transmission du virus responsable de FHCC se fait par des piqûres de tiques dures de la famille des Ixodidae, notamment le genre Hyalomma.1
Le virus ingéré lors d’un repas de sang se réplique dans la paroi de l’intestin moyen de la tique et se propage à de nombreux tissus, atteignant des concentrations plus élevées dans les glandes salivaires et les organes reproducteurs.9
Les larves des tiques infectent préférentiellement des petits mammifères, comme les rongeurs, ou des oiseaux.9,10 Elles s’y transforment en nymphes et se détachent ensuite de leur hôte. Devenues adultes, elles cherchent un nouvel hôte, généralement un grand mammifère. Ceux-ci servent alors d’hôtes amplificateurs asymptomatiques.9,10 On a également montré que les reptiles jouent un rôle dans la circulation du virus FHCC, les tiques H. aegyptiacum parasitant les tortues du genre Testudo.10
Dans la population de tiques, la transmission du virus peut être verticale (ou trans-ovarienne c’est-à-dire via les œufs) : elle se fait par les tiques femelles infectées qui pondent des œufs porteurs du virus.9,10 On sait peu de choses sur les facteurs qui influencent le pourcentage d’œufs infectés.9
La transmission horizontale implique tiques et mammifères.9 La propagation du virus FHCC se produit principalement au printemps et en été, lorsque les larves et les nymphes se nourrissent de sang pour grandir et se métamorphoser, et que les femelles adultes se préparent à pondre leurs œufs.9 En France, la forme adulte pique les ongulés domestiques et sauvages, et occasionnellement l’humain.11
La transmission à l’être humain se fait principalement par les morsures de tiques adultes infectées.9,10 La fréquence de piqûre est supposée faible, ces tiques n’ayant pas d’appétence particulière pour les humains. Généralement plus visibles que d’autres espèces de tiques, car un peu plus grosses, il est plus aisé de les repérer avant qu’elles ne piquent.11 La transmission est saisonnière, active au printemps, entre avril et juillet.11
La transmission peut aussi se faire par contact avec des fluides biologiques provenant d’animaux infectés.9,10 Des infections virales nosocomiales sont également possibles par contact des liquides biologiques d’un patient contaminé avec les muqueuses du soignant.10 Ce type de transmission se retrouve également lors de soins vétérinaires ou dans les abattoirs.10 Une contamination après contact sexuel entre partenaires a été évoquée. Des données semblent démontrer la capacité du virus à se multiplier dans le tractus génital humain, masculin ou féminin.12
Le virus FHCC est un virus membre du genre Nairovirus appartenant à la famille Bunyaviridae.9,10 Il s’agit d’un virus enveloppé à génome segmenté constitué de trois ARN simples brins de polarité négative.10 Les cellules hépatiques, les endothéliums et les cellules phagocytaires sont ciblés. Après internalisation, le virus se réplique dans le cytosol d’où ils sont libérés par sécrétion.10
On retrouve le virus sur plusieurs continents en fonction de la localisation de son vecteur et de ses différents hôtes. Avec le réchauffement climatique, les aires de répartition de la tique changent, avec pour effet le risque d’émergence du virus dans de nouvelles zones géographiques.10
Alors que les animaux infectés sont généralement asymptomatiques, l’être humain peut développer une infection grave.10
La FHCC présente quatre phases :
La phase pré-hémorragique comprend une montée soudaine de fièvre, des vertiges, des maux de tête, une photophobie, des douleurs dans le dos et le ventre. La phase hémorragique se caractérise par la formation de pétéchies (petites taches rouges sur la peau), d’ecchymoses, la présence de sang dans les urines et les fèces, des saignements externes affectant nez, gencives, peau…10 Les sujets les plus atteints peuvent développer des hémorragies cérébrales et des nécroses massives du foie, associées à des pronostics vitaux défavorables.10
Le diagnostic direct repose sur la détection de l’ARN viral par PCR (reverse transcription quantitative) à partir du sang, du sérum ou des tissus. Il peut également passer par la détection des antigènes viraux et l’isolement du virus dans un laboratoire P4.12
Les anticorps IgM et IgG sont détectables dès le 5e jour de la maladie par ELISA ou immunofluorescence indirecte. La réponse aux anticorps est parfois absente ou retardée dans les cas les plus graves.12
La prise en charge de la FHCC repose principalement sur le traitement symptomatique de soutien à visée générale privilégiant par exemple la réhydratation orale ou parentérale ou le support hémodynamique. Des traitements antalgiques ou antipyrétiques peuvent être nécessaires, à l’exclusion des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), et en tenant compte des éventuels retentissements hépatiques de l’infection.2,12
La ribavirine a été utilisé pour lutter contre la FHCC, mais son efficacité fait débat.10,12 Parmi les autres antiviraux, le favipiravir a, certes, montré des résultats encourageants dans certains modèles animaux mais aucune donnée fiable n’existe en médecine humaine, ce qui ne permet pas de recommander son utilisation. Il en est de même pour le molnupiravir.12
Il n’existe à l’heure actuelle aucun vaccin contre la FHCC autorisé en France et aucun recommandé par l’OMS.2,12
La prévention vise à éviter les piqûres de la tique Hyalomma, avec le port de vêtements couvrants, de couleur claire pour mieux repérer les tiques, et de chaussures fermées voire l’utilisation de répulsifs cutanés.
Pour en savoir plus : https://www.hcsp.fr/explore.cgi/avisrapportsdomaine?clefr=1374