Impact de la pandémie de Covid-19 sur l’épidémie de VIH en France : point d’information par les chercheurs en santé publique

Impact de la pandémie de Covid-19 sur l’épidémie de VIH en France : point d’information par les chercheur.euse.s en santé publique

Publié le 20 septembre 2021

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Dans un rapport d’information adressé fin août au ministère des Solidarités et de la Santé, le groupe « Indicateurs » de l’Action Coordonnée 47 (AC47) de l’ANRS | Maladies infectieuses émergentes a évalué l’impact de la crise sanitaire sur les activités de soins, de dépistage et de prévention du VIH en France. Dominique Costagliola, directrice de recherche émérite à l’Inserm et présidente de l’AC47, revient sur les principaux résultats obtenus.


Le groupe « Indicateurs » de l’AC47 avait publié en juillet 2020 un rapport sur l’infection par le VIH en France entre 2013 et 2018. De nouvelles données avaient complété ce rapport en décembre 2020, dressant un premier bilan de l’effet de la crise sanitaire sur l’épidémie de VIH. « Cette fois-ci encore, notre objectif était d’actualiser les données recueillies l’année dernière et de commencer à mesurer l’impact de la crise sur le VIH : c’est une interrogation naturelle pour tou.te.s celles et ceux qui travaillent sur cette pathologie », rapporte Dominique Costagliola. Le Fonds mondial de lutte contre le sida, le paludisme et la tuberculose s’est également penché sur cette question dans son rapport annuel paru le 8 septembre 2021.

Peu de conséquence pour les patient.e.s déjà suivi.e.s, mais une forte baisse du dépistage constatée

« En France, nous avons constaté que la crise sanitaire n’a quasiment pas eu d’impact mesurable avec les indicateurs disponibles sur la prise en charge des personnes vivant avec le VIH (PVVIH) déjà suivies », rapporte Dominique Costagliola. En 2020 et 2021, les délivrances de traitements antirétroviraux ont même légèrement augmenté. Les téléconsultations et les prescriptions par e-mails semblent avoir compensé les fermetures des services de consultations. La Covid-19 n’a pas eu de répercussion sur l’efficacité du traitement comme moyen de prévention.

En revanche, le dépistage du VIH a pâti de la crise sanitaire. Par rapport aux dépistages sanguins attendus entre mars 2020 et avril 2021, un déficit de 16 % est rapporté. Les ventes d’autotests ont diminué de 22 % en 2020. Les nouvelles initiations de traitement ont baissé de près de 20 % de mars 2020 à avril 2021. Il s’agit d’un signal préoccupant selon Dominique Costagliola : « la crise sanitaire a eu un impact négatif global sur le dépistage du VIH, que ce soit dans les populations à risque ou dans la population générale. Nous craignons d’assister à une augmentation de personnes prises en charge tardivement ».

Recul de la prophylaxie pré-exposition (PrEP)

Alors que la délivrance de la PrEP avait augmenté en 2019, les chercheur.euse.s ont constaté un déficit par rapport aux chiffres attendus de 17 % pour la période de mars 2020 à avril 2021. « On sait aujourd’hui que la PrEP est bien tolérée et efficace pour prévenir les nouvelles infections par le VIH. Avant la crise, on envisageait son déploiement auprès de nouveaux profils de personnes. Aujourd’hui, on se retrouve un pas en arrière », déplore Dominique Costagliola.

L’arrêt de la transmission du VIH toujours possible en 2030 ?

Selon la chercheuse, l’objectif de l’arrêt de la transmission du VIH reste atteignable d’ici 2030 selon la façon dont les acteur.trice.s du VIH réagissent : « cela va dépendre des prochaines recommandations sur la prise en charge du VIH. Si la PrEP est recommandée plus largement, des campagnes permettront d’aller de l’avant et de rattraper le retard. » L’impact de la crise sanitaire est certainement plus important dans les populations clés, telles que les migrant.e.s ou les travailleur.euse.s du sexe. « Il faut aussi redoubler nos efforts de dépistage avec, par exemple, la généralisation d’initiatives comme « Au labo sans ordo » », conclut Dominique Costagliola.

 

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