Essai ANRS 12206 MONOD

Stratégie de simplification du traitement antirétroviral précoce du nourrisson en Afrique de l'Ouest

Publié le 22 avril 2016

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Le traitement précoce basé sur le lopinavir est réalisable et efficace chez le jeune enfant avant l’âge de deux ans en Afrique de l’Ouest à condition d’améliorer l’accès précoce au diagnostic de l’infection par le VIH. La simplification de ce traitement chez les enfants en succès virologique stable avec de l’efavirenz est possible : non inférieur au lopinavir en terme de succès virologique mais pose le problème d’émergence de mutations de résistances qui risque de faire échouer le traitement à plus long terme. C’est ce que montrent les résultats du projet ANRS 12206 MONOD coordonnée par le Dr Valériane Leroy (Inserm U1027, Toulouse, et site ANRS PACCI Abidjan) présentés à la 8ème Conférence de l’AFRAVIH qui se tient à Bruxelles du 20 au 23 avril 2016 à Bruxelles.


Quels étaient les objectifs de l’essai MONOD ?


Cet essai visait à évaluer une stratégie de simplification du traitement antirétroviral chez des enfants infectés par le VIH, traités de façon précoce (avant l’âge de deux ans) avec une trithérapie comprenant du lopinavir (en deux prises par jour) et en succès virologique au bout d’un an pouvant « switcher » vers une stratégie d’épargne basé sur l’efavirenz, en une prise par jour. Notre objectif était aussi de déterminer en amont de cet essai randomisé de non infériorité, la faisabilité du traitement précoce chez l’enfant dans les pays du Sud qui, bien que recommandé par l’Organisation Mondiale de la Santé, est encore peu mis en pratique, en particulier en Afrique de l’Ouest. L’essai a été réalisé entre 2011 et 2015 dans deux pays d’Afrique de l’Ouest, le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire.


Quels résultats avez-vous obtenu ?


Le premier constat est que le diagnostic pédiatrique de l’infection par le VIH est encore souvent trop tardif. En médiane, les enfants ont été inclus dans l’essai et mis sous traitement à 13 mois de vie que le traitement pourrait être mis en route dès deux ou trois mois de vie. Il y a donc d’importants efforts à mettre en œuvre en Afrique de l’Ouest pour améliorer l’accès au dépistage virologique du VIH pour permettre un traitement antirétroviral précoce des enfants. L’étude montre par ailleurs une bonne tolérance, et efficacité du traitement initial basé sur le lopinavir, avec 78% des enfants en succès virologique après 12 mois de traitement. Enfin, il met en évidence une absence d’infériorité du traitement simplifié basé sur l’efavirenz par rapport à la poursuite de la trithérapie initiale sur le maintien du succès virologique (avec une charge virale inférieure à 1000 copies/ml) et estimé à 86% après un an de suivi. Cependant, nous avons constaté davantage de mutations de résistance chez les enfants sous efavirenz qui par ailleurs sont souvent exposés via le lait maternel aux antirétroviraux que reçoivent leurs mères pendant la période postnatal. Cette stratégie d’épargne pourrait être envisagée chez des patients avec une bonne observance. Cependant, au final, la stratégie simplifiée ne nous semble pas devoir être recommandée en routine, afin de ne pas faire courir le risque d’un échec thérapeutique aux enfants.


D’autres résultats importants ressortent-ils ?


La malnutrition est un aspect essentiel de la prise en charge. On constate que la malnutrition est fréquente chez les enfants infectés par le VIH. Elle doit être systématiquement dépistée lors de l’initiation du traitement antirétroviral et il faut proposer une prise en charge nutritionnelle, avec prescription d’une supplémentation, à tous les enfants malnutris, même de façon modérée. Même si la malnutrition s’améliore avec le traitement antirétroviral, ce dernier est insuffisant pour rattraper les retards de croissance. Par ailleurs, nous avons observé que lorsque le père est en charge des soins de l’enfant, la réponse virologique au traitement est globalement moins bonne. Cela concerne essentiellement les enfants orphelins de leur mère. C’est vraisemblablement lié à une moins bonne observance du traitement de l’enfant par le père. C’est donc une situation, facile à identifier lors de la prise en charge de l’enfant, à laquelle les équipes soignantes doivent porter une attention particulière pour renforcer l’éducation thérapeutique.