Validation d’une stratégie de simplification thérapeutique pour les pays du sud

L’essai ANRS 12286 MOBIDIP permet de valider, une stratégie d’allégement thérapeutique de deuxième ligne, moins chère et mieux tolérée que les trithérapies chez des patients aux virus présentant de multiples mutations.

Publié le 15 juin 2017

 

 

 

 

 


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ANRS 12286 MOBIDIP(1), a clinical trial running in parallel in three countries in sub-Saharan Africa (Cameroon, Burkina Faso, and Senegal), shows that dual therapy with lamivudine and a boosted protease inhibitor is effective as second-line treatment in patients infected by HIV with multiple mutations. Such treatment de-escalation will reduce costs, side effects, and the need for virological monitoring of patients. The results of this study, led by Laura Ciaffi (TransHIVMI; Inserm-IRD-Université de Montpellier) and Sinata Koulla-Shiro (ANRS site -Cameroon), is published in The Lancet HIV on May 28, 2017.

L’essai ANRS 12286 MOBIDIP permet de valider, une stratégie d’allégement thérapeutique de deuxième ligne, moins chère et mieux tolérée que les trithérapies chez des patients aux virus présentant de multiples mutations. Cette bithérapie associant l’IPB à la lamivudine pourrait répondre aux contraintes économiques et de suivi virologique qui pèsent sur les pays aux ressources limitées. L’essai ANRS 12286 MOBIDIP a été mené par Laura Ciaffi du laboratoire TransVIHMI (laboratoire mixte de recherche Inserm-IRD-Université de Montpellier), le professeur Sinata Koulla-Shiro et ses collègues du site ANRS Cameroun, du Burkina Faso et du Sénégal. Ces résultats ont fait l’objet d’une publication dans la revue The Lancet HIV le 29 mai 2017.

 


Les traitements de seconde ligne contre le VIH recommandés par l’OMS dans les pays à ressources limitées ont une très bonne efficacité. Cependant, il n’existe pour l’heure pas de solution fiable qui permettrait d’alléger ces traitements, tout en maintenant une charge virale indétectable.

Deux stratégies pourraient apporter une solution à ce problème. D’une part, la monothérapie à base d’inhibiteur de la protéase boosté (IPB), qui a déjà été étudiée au cours de plusieurs essais. Les résultats sont encourageants, mais ont révélé un risque accru de remontée de la charge virale ce qui présente des risques dans les pays à ressources limitées. En effet, dans ce contexte, les patients n’ont pas accès à un suivi virologique régulier qui permettrait d’identifier rapidement un échec au traitement. L’autre stratégie envisagée est une bithérapie associant la lamivudine à l’IPB. L’association à l’IPB de la lamivudine, qui est peu chère, bien tolérée et souvent utilisée dans les traitements de première ligne a également déjà montré une bonne efficacité. Elle n’a cependant jamais été évaluée chez des patients dont les virus présentent des mutations de résistances, notamment celle très répandue à la lamivudine (M184V).

L’essai ANRS 12286 MOBIDIP a ainsi comparé, pour la première fois ces deux stratégies d’allègement thérapeutique, pour des patients étant en seconde ligne de traitement avec un bon contrôle virologique, dans le contexte des pays à ressources limitées.

Second-line treatments of HIV infection recommended by the WHO for resource-limited countries are highly effective. However, there is currently no reliable way of de-escalating these treatments, while maintaining an undetectable viral load. Two strategies may provide a solution. The first is monotherapy with a boosted protease inhibitor (BPI), which in several trials has already yielded encouraging results, albeit with a risk of increased viral load. Such an increase constitutes a risk in resource-limited countries because patients there do not have access to regular virological monitoring, which can identify treatment failure. The second strategy is to combine a BPI with lamivudine, which is inexpensive, well tolerated, often used first line, and effective. This combination, however, has never been evaluated in patients infected by HIV with mutations that confer drug resistance, notably to lamivudine (M184V). ANRS 12286 MOBIDIP is the first trial to compare these two treatment de-escalation strategies in resource-limited countries, in patients with viremia controlled by second-line treatment.


ANRS 12286 MOBIDIP : évaluer l’efficacité d’une nouvelle stratégie thérapeutiqueANRS 12286 MOBIDIP: assessing the efficacy of a new therapeutic strategy


ANRS 12286 MOBIDIP was led from 2014 and 2016 by Laura Ciaffi of TransHIVMI (joint Inserm-IRD-Université de Montpellier research unit, directed by Eric Delaporte of IRD/Université de Montpellier) and Sinata Koulla-Shiro (ANRS site – Cameroon) and her colleagues in 3 countries of sub-Saharan Africa (Cameroon, Burkina Faso, and Senegal). The study’s 265 patients2 had an initial viral load below 200 copies/mL, and were followed up for 96 weeks. The main purpose of ANRS 12286 MOBIDIP was to compare the failure rates of the two therapeutic strategies: monotherapy and dual therapy. Half the study patients received BPI treatment and the other half were given BPI plus lamivudine. After 48 weeks of treatment, monotherapy was interrupted and the patients resumed triple drug therapy. The patients on dual therapy continued their treatment till week 96.

L’essai ANRS 12286 MOBIDIP a été mené par Laura Ciaffi du laboratoire TransVIHMI (laboratoire mixte de recherche Inserm-IRD-Université de Montpellier), dirigé par Eric Delaporte (IRD/Université de Montpellier), le professeur Sinata Koulla-Shiro et ses collègues du site ANRS Cameroun, du Burkina Faso et du Sénégal entre 2014 et 2016 dans ces 3 pays d’Afrique subsaharienne. Les 265 patients2 suivis pendant une durée de 96 semaines présentaient, au début de l’étude, une charge virale inférieure à 200 copies/ml.L’objectif principal de l’étude était de comparer les taux d’échec des deux stratégies thérapeutiques : monothérapie et bithérapie. Pour cela, la moitié des patients de l’étude ont reçu le traitement à base d’IPB et l’autre moitié le traitement IPB associé à la lamivudine. Après 48 semaines de traitement, la monothérapie a été interrompue et les patients sont revenus à la trithérapie. Les patients sous bithérapie ont, eux, continué leur traitement jusqu’à la semaine 96.


Efficacité de la bithérapie associant la lamivudineEfficacy of dual therapy including lamivudine


Les chercheurs ont évalué les taux d’échec de chaque stratégie, définis par une remontée de la charge virale au-dessus de 500 copies/ml chez les patients. Ainsi, la bithérapie associant la lamivudine a montré seulement 3 % d’échec (4 échecs /132 patients), contre 24,8 % pour la monothérapie (33/133 patients). Les chercheurs ont également constaté une plus forte augmentation des lymphocytes CD4 chez les patients suivant la bithérapie (65 contre 12 cellules/mm3), signe de renforcement du système immunitaire.

Globalement les deux traitements étudiés ont été bien tolérés par les patients.

L’essai ANRS 12286 MOBIDIP a ainsi permis de valider, pour la première fois, une stratégie d’allégement thérapeutique de deuxième ligne, moins chère et mieux tolérée que les trithérapies chez des patients aux virus présentant de multiples mutations. Cette bithérapie associant l’IPB à la lamivudine pourrait ainsi être un traitement répondant aux contraintes économiques et de suivi virologique qui pèsent sur les pays aux ressources limitées. De plus, l’utilisation de la lamivudine, déjà connue des patients en première ligne de traitement, permet d’épargner le passage à une nouvelle classe de molécules qui pourra, si besoin, leur être prescrite plus tard.

1) Evaluation d’une stratégie de maintenance d’inhibiteurs de la protéase avec ou sans lamivudine chez des patients ayant une charge virale contrôlée sous deuxième ligne d’antirétroviraux en Afrique (Yaoundé, Bobo-Dioulasso, Dakar).

2) Ces patients étaient issus de l’essai ANRS 12169 2LADY (essai comparatif portant sur des trithérapies de deuxième ligne) 

 

Source

Boosted protease inhibitor monotherapy versus boosted protease inhibitor plus lamivudine dual therapy as second line maintenance treatment in HIV-1 infected patients in Sub Saharan Africa (ANRS12 286/MOBIDIP): a randomized, controlled, open-label superiority trial. Laura Ciaffi1, Sinata Koulla-Shiro2, Adrien Sawadogo3, Cheik Tidiane Ndour4, Sabrina Eymard-Duvernay1, Pretty Rosereine Mbouyap2, Liliane Ayangma5, Jacques Zoungrana3, Ndeye Fatou Ngom Gueye6, Mohamadou Diallo4, Suzanne Izard1, Guillaume Bado3, Coumba Toure Kane7, Avelin Aghokeng1,8, Martine Peeters1, Pierre Marie Girard9, Vincent Le Moing1, Jacques Reynes1, Eric Delaporte1 for the MOBIDIP Study Group. The Lancet HIV, 28 mai 2017.

1) IRD UMI 233 – INSERM U1175 – Montpellier University, Montpellier France, 2) ANRS Research Centre Cameroon, Central Hospital, Yaoundé Cameroon, 3) Day Care Center, University Hospital Souro Sanou, Bobo Dioulasso Burkina Faso, 4) Research and Training Center (CRCF), Fann University Hospital, Dakar Senegal, 5) Ambulatory Treatment Center, Military Hospital, Yaounde Cameroon, 6) Day Care Center, Fann University Hospital, Dakar Senegal, 7) CHU A Le Dantec Laboratoire de Bactériologie-Virologie Dakar, Sénégal 8) Virology laboratory IMPM-IRD Centre de Recherche sur les Maladies Emergentes, Yaounde Cameroon, 9) Department of Infectious and Tropical Diseases, Saint-Antoine Hospital, AP-HP INSERM UMR S 1136, Paris France

 

The rate of treatment failure, defined as a viral load above 500 copies/mL, was 3% (4/132 patients) for dual therapy and 24.8% for monotherapy (33/133 patients). CD4 cell count increased greatly in the patients on dual therapy (65 versus 12 cells/mm3), indicating increased immune defense. Overall, both treatments were well tolerated by the patients.

ANRS 12 286 MOBIDIP has provided the first evidence of the efficacy of de-escalated second-line therapy, which is less costly and better tolerated than triple-drug therapy in patients infected by HIV with multiple mutations. This dual therapy combining BPI and lamivudine could be appropriate in resource-limited countries with economic and virological monitoring constraints. Moreover, the use of lamivudine, which is already used in first-line treatment, could avoid the switch to another class of drugs, which could be prescribed later if necessary.

1) Evaluation of a maintenance strategy using protease inhibitor with or without lamivudine in patients in Africa (Yaoundé, Bobo-Dioulasso, Dakar) with a viral load controlled by second-line antiretroviral therapy

2) These patients were from ANRS 12169 2LADY (comparative trial of second-line triple drug therapies).

 

Reference

Boosted protease inhibitor monotherapy versus boosted protease inhibitor plus lamivudine dual therapy as second line maintenance treatment in HIV-1 infected patients in Sub Saharan Africa (ANRS12 286/MOBIDIP): a randomized, controlled, open-label superiority trial. Laura Ciaffi(1), Sinata Koulla-Shiro(2), Adrien Sawadogo(3), Cheik Tidiane Ndour(4), Sabrina Eymard-Duvernay(1), Pretty Rosereine Mbouyap(2), Liliane Ayangma(5), Jacques Zoungrana(3), Ndeye Fatou Ngom Gueye(6), Mohamadou Diallo(4), Suzanne Izard(1), Guillaume Bado(3), Coumba Toure Kane(7), Avelin Aghokeng(1,8), Martine Peeters(1), Pierre Marie Girard(9), Vincent Le Moing(1), Jacques Reynes(1), Eric Delaporte(1) for the MOBIDIP Study Group. The Lancet HIV, 28 may 2017.

1) IRD UMI 233 – INSERM U1175 – Montpellier University, Montpellier France, 2) ANRS Research Centre Cameroon, Central Hospital, Yaoundé Cameroon, 3) Day Care Center, University Hospital Souro Sanou, Bobo Dioulasso Burkina Faso, 4) Research and Training Center (CRCF), Fann University Hospital, Dakar Senegal, 5) Ambulatory Treatment Center, Military Hospital, Yaounde Cameroon, 6) Day Care Center, Fann University Hospital, Dakar Senegal, 7) CHU A Le Dantec Laboratoire de Bactériologie-Virologie Dakar, Sénégal 8) Virology laboratory IMPM-IRD Centre de Recherche sur les Maladies Emergentes, Yaounde Cameroon, 9) Department of Infectious and Tropical Diseases, Saint-Antoine Hospital, AP-HP INSERM UMR S 1136, Paris France.

 


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