Le mpox est une maladie émergente caractérisée cliniquement par une éruption cutanée associée à de la fièvre et à des adénopathies. Cette maladie, dans sa forme africaine classique, guérit généralement d'elle-même, sauf chez les enfants dénutris souffrant d'une co-infection bactérienne et chez certains patients infectés par le VIH. Elle est historiquement endémique dans les forêts d'Afrique Centrale et de l'Ouest. En 2022-2023, une épidémie s'est déclarée avec une distribution mondiale par le biais d'une transmission par voie sexuelle, principalement chez les hommes ayant des rapports sexuels avec d'autres hommes. Cette pandémie a touché près de 100000 personnes et fait environ 150 morts. Actuellement, on observe une augmentation significative des cas en Afrique Centrale, en particulier en République démocratique du Congo, avec une épidémie à l'est du pays et dans les pays voisins, et ce principalement par transmission lors de rapports hétérosexuels.
Le mpox est une zoonose d'origine africaine causée par le virus monkeypox (MPXV), un Orthopoxvirus. Malgré de nombreuses études, son réservoir animal n'a toujours pas été identifié. Cependant, plusieurs pistes, dont notre récente étude basée sur des niches écologiques, indiquent que le réservoir est constitué de rongeurs, en particulier d'espèces d'écureuils arboricoles, comme Funisciurus anerythrus, vivants dans les forêts tropicales d'Afrique Centrale et de l'Ouest. Notre hypothèse est que cet écureuil africain ou une espèce apparentée est le ou l'un des réservoirs animaux du MPXV.
Nos objectifs sont d'identifier quelle(s) espèce(s) de rongeurs est/sont impliquée(s) en tant qu'hôte(s) réservoir, de caractériser son/leur histoire évolutive sur la base de données génétiques, de faire une comparaison avec l'évolution spatio-temporelle des MPXV d'origine zoonotique, et de détecter et caractériser le MPXV dans des spécimens de musée collectés en Afrique Centrale et en Afrique de l'Ouest depuis des années, voire des décennies.
Pour réaliser ce projet, nous devons comparer la phylogéographie de plusieurs espèces d'écureuils avec celle du MPXV. Il est donc nécessaire de générer des séquences d'ADN sur des écureuils géoréférencés collectés dans les forêts tropicales d'Afrique Centrale et de l’Ouest. Pour cela, nous avons déjà obtenu une grande série d'ADN, à partir de biopsies réalisées sur des spécimens conservés dans des collections muséales (MNHN à Paris, RMCA à Tervuren, etc.) L'approche « muséomique » présente deux avantages : elle évite toute mission de terrain pour collecter des animaux dans les forêts d'Afrique, ce qui signifie aucun impact environnemental, et nous permet de tester la présence du MPXV dans des spécimens collectés aux XIXème et XXème siècles, ce qui pourrait s'avérer particulièrement utile pour dater la diversification passée du virus. Nos résultats préliminaires indiquent que les extraits d'ADN des spécimens de musée peuvent être amplifiés par PCR et séquencés par NGS, générant ainsi l'ADN génomique des hôtes et du MPXV.
Les étapes de notre étude sont : a) prélever des spécimens supplémentaires d'écureuils dans les collections des musées afin d'avoir une série provenant de la plupart des pays d'Afrique Centrale et de l'Ouest, b) déterminer la qualité des ADN afin de sélectionner ceux qui seront utilisés pour la PCR, la capture d'exon et les NGS, c) assembler des séquences de haute qualité à partir de ces spécimens, d) inférer la phylogéographie de plusieurs espèces d'écureuils provenant d'Afrique tropicale, e) établir une comparaison avec la phylogéographie des MPXV d'origine zoonotique en termes de structures géographiques et d'estimations du temps de divergence, f) détecter et caractériser les MPXV présents dans les spécimens d'écureuils des collections, g) inclure ces séquences dans les analyses phylogénétiques afin de mieux estimer l'échelle de temps moléculaire de l'évolution des MPXV.
Sur la base de toutes ces données, nous croyons que notre approche expérimentale, combinée à notre expertise en mammalogie, phylogénie et virologie moléculaire, nous permettra de répondre rapidement à nos hypothèses de travail concernant le réservoir animal du MPXV.