A l’instar des lymphocytes T, les cellules myéloïdes apparaissent aujourd’hui comme des cellules essentielles lors du développement de la pathologie liée à l’infection par le VIH-1. Ces différentes cellules cibles du virus, les lymphocytes T mais aussi les macrophages (MFs), les cellules dendritiques (DCs) et les ostéoclastes (OCs), peuvent être infectées par transmission du virus de cellule à cellule. Ce mode de transmission jouerait un rôle essentiel lors de la transmission sexuelle au niveau des muqueuses mais aussi lors de la dissémination du virus dans l’organisme. En effet, des cellules myéloïdes infectées sont retrouvées dans tous les tissus, notamment dans le cerveau, mais aussi dans les os, où l’infection des OCs pourrait participer aux déficits osseux induits par le virus. La dissémination du virus par transfert de cellule à cellule est non seulement plus efficace que l’infection par du virus libre, mais elle permettrait également au virus d’échapper au système immunitaire et aux traitements antiviraux. Cependant, les mécanismes impliqués dans ces processus de transfert viral intercellulaire sont mal connus. Notre équipe a récemment mis en évidence un transfert du VIH-1 rapide et efficace des lymphocytes T infectés vers les MFs via un processus de fusion en deux étapes (première fusion d’un lymphocyte T infecté avec un MF, puis fusion MF-MF), qui mène à la formation de cellules géantes multinucléées (MGCs) capables de produire de grandes quantités de virus.
Au vu de l’importance des cellules myéloïdes dans la pathologie du VIH-1 et de l’efficacité du transfert viral de cellule à cellule, il est primordial de mieux comprendre les mécanismes qui contrôlent la transmission du virus des lymphocytes T infectés vers les cellules myéloïdes. Ainsi, l’objectif de ce projet sera de caractériser les mécanismes cellulaires et moléculaires impliqués dans le transfert du VIH-1 vers les cellules myéloïdes (MFs, DCs et OCs).
Dans une première partie, nous déterminerons in vitro, en utilisant des systèmes de co-cultures et des approches de microcopie sur cellules fixées et vivantes, si les OCs et les DCs sont infectés via les lymphocytes T infectés selon un processus de fusion en deux étapes comparables à celui décrit pour l’infection des MFs. De plus, nous déterminerons l’efficacité de cette voie de transmission dans des modèles d’explants humains (synoviaux et cervico-vaginaux) contenant des MFs, DCs et OCs tissulaires.
Le deuxième objectif sera d’étudier les mécanismes moléculaires impliqués dans ce processus de fusion en deux étapes. Nous nous focaliserons sur le rôle des protéines liées au cytosquelette d’actine, sur les voies de signalisation qui régulent l’actine et sur les protéines impliquées dans la fusion cellulaire. Pour cela, en parallèle des systèmes de co-culture, nous développerons un système microfluidique original permettant d’optimiser le couplage entre deux cellules d’une manière contrôlée, efficace et synchrone.
Enfin, le dernier objectif sera d’examiner les fonctions des MGCs infectés obtenues par ces processus de fusions cellulaires. En particulier, nous étudierons si la présence de matériel provenant des lymphocytes T dans les MGCs modifie leur phénotype et/ou leurs fonctions. Nous étudierons en particulier la phagocytose, la migration cellulaire et la dégradation de la matrice osseuse.
Ce projet ambitieux est programmé sur une durée de 3 ans. Il bénéficie de la collaboration déjà solidement établie entre l’équipe de Serge Bénichou (Institut Cochin, Paris) et de Christel Vérollet de l’équipe d’Isabelle Maridonneau-Parini (Institut de Pharmacologie et Biologie Structurale, Toulouse).
Ce projet permettra de mieux comprendre le rôle des cellules myéloïdes dans la pathologie liée à l’infection par le VIH-1, au niveau de la transmission, de la dissémination du virus et de l’établissement des réservoirs viraux tissulaires. De plus, il pourrait permettre, à plus long terme, de développer de nouvelles approches thérapeutiques ciblées.