Un grand nombre de maladies humaines sont transmises par les moustiques, notamment le paludisme et les arboviroses. L’OMS estime que l’une des principales conséquences du réchauffement climatique sera une augmentation importante de ces maladies. De nombreux agents pathogènes transmis par les moustiques sont encore actuellement limités aux régions tropicales et subtropicales, mais devraient étendre leur aire de répartition géographique actuelle, envahissant les régions plus tempérées. C’est notamment le cas pour le Sud de la France, avec des cas autochtones de dengue. Plusieurs maladies transmises par les moustiques sont préoccupantes, car ces espèces vectrices s’adaptent bien à l’environnement urbain. C’est le cas d’Aedes aegypti, le principal vecteur des virus de la dengue, du Zika, du chikungunya et de la fièvre jaune ainsi que de de plusieurs nouvelles espèces de moustiques invasives en Europe, capables de transmettre des arbovirus, tel que le moustique tigre Aedes albopictus, également présent en Asie du Sud-Est.
Ainsi, l’augmentation globale des températures et l’implantation d’espèces vectrices en milieu urbain représentent un risque important d’épidémies d’arboviroses. La région de l’Asie du Sud-Est est affligée depuis des décennies par des épidémies de dengue se produisant à intervalles réguliers, et représente une aire géographique dans laquelle une meilleure compréhension des maladies urbaines transmises par les moustiques est nécessaire, dans le but de développer des stratégies de lutte appropriées.
Les principaux défis à relever pour orienter l’élaboration des stratégies d’atténuation sont (i) une compréhension plus complète de la distribution spatiale intra-urbaine du risque d’agent pathogène transmis par les moustiques, (ii) l’amélioration de la surveillance entomologique actuellement inadéquate et (iii) l’amélioration des outils de surveillance aux niveaux local, national et régional. Ce projet propose une approche multi-niveaux pour comprendre le risque de dengue, de l’échelle intra-urbaine à l’échelle nationale et enfin à l’échelle régionale. Afin de comprendre le risque local, il est essentiel d’intégrer la mobilité humaine et l’adéquation entre habitats réels et habitats projetés des moustiques dans les scénarios de changement climatique à ces échelles géographiques.
Le projet calibrera ainsi un modèle intra-urbain basé sur des agents intégrant la mobilité et l’adéquation de l’habitat à Bangkok en utilisant de nouveaux indices de moustiques qui vont au-delà des indices traditionnels actuels qui restent inefficaces. Ce modèle sera ensuite extrapolé aux autres grandes villes d’Asie du Sud-Est et validé à l’aide d’informations locales sur la dengue et les densités de moustiques. A partir du niveau de la ville, nous passerons ensuite aux échelles nationale et régionale en utilisant des mesures plus agrégées de la mobilité humaine liées à l’incidence de la dengue provenant des systèmes de surveillance nationaux. Enfin, nous développerons une couche d’ interopérabilité pour connecter chaque plateforme de surveillance nationale au niveau d’un tableau de bord régional. La plateforme intégrera des éléments de modélisation utilisant différentes sources de données, en mettant l’accent sur la surveillance environnementale par satellite, afin de fournir la base d’un système d’alerte précoce.
Cet ambitieux projet vise à générer un système de prédiction et de surveillance pouvant être mis en œuvre dans les villes du monde entier, permettant aux autorités de santé publique de répondre rapidement à l’émergence d’un agent pathogène transmis par les moustiques. Ce projet contribuera directement à plusieurs objectifs du programme PRFI EMERGENCE 2023 en accélérant l’acquisition de connaissances sur les maladies infectieuses émergentes, en partageant les connaissances entre les pays et les disciplines, et en nous permettant de définir des outils de surveillance standardisés. Il cible l’émergence chez l’homme en développant des méthodes et des outils de surveillance permettant de comprendre la dynamique à plusieurs échelles et de modéliser la survenue d’épidémies.
Applicant
BOYER Sébastien / PAUL Richard