Dernière mise à jour le 14 mars 2023
Les premiers résultats de l’essai ANRS VRI06 de phase I (1) d’un vaccin préventif contre le VIH conduit par l’Inserm-ANRS et le Vaccine Research Institute (2) (ANRS et Université Paris-Est Créteil) révèlent que le candidat vaccin est sûr et induit une réponse immunitaire précoce, importante et durable. Ces résultats ont été présentés le 21 février 2023 à la CROI, la conférence internationale sur les rétrovirus et les infections opportunistes, qui s’est tenue du 19 au 22 février à Seattle et en ligne.
Bien que ces résultats préliminaires soient encourageants, il est important de noter que l’efficacité du vaccin reste encore à démontrer.
L’essai est mené en double aveugle avec l’injection d’un placebo à certains volontaires. La sécurité et l’immunogénicité (5) ont été évaluées aux semaines 6, 26 et 48.
A la semaine 26, les résultats observés chez les 36 premiers volontaires inclus (âgés en moyenne de 34 ans, dont 64 % sont des hommes), montrent que le candidat vaccin est sûr et bien toléré par les volontaires. Si des réactions locales au point d’injection et générales ont été fréquentes, ces effets indésirables étaient principalement légers ou modérés. Deux effets secondaires sévères ont été rapportés et, après analyse, se sont révélés sans lien avec la vaccination.
L’équipe de chercheurs a observé que le vaccin induisait des taux élevés d’anticorps dirigés contre les protéines d’enveloppe du VIH : entre 80 % à 100 % à la semaine 6, 100 % à la semaine 26 dans tous les groupes (0,3, 1 et 3 mg). Ces taux sont restés stables, ou en légère baisse, jusqu’à la semaine 48. Des anticorps ciblant une zone spécifique de l’enveloppe du VIH (la région V1/V2) ont également été produits. De plus, des anticorps neutralisants ont été détectés chez 50 % des personnes vaccinées du groupe 0,3 mg et chez 100 % des deux autres groupes à la semaine 26.
Les chercheurs ont également observé la production de lymphocytes T CD4 spécifiquement dirigés contre la protéine d’enveloppe du VIH après la vaccination qui restent stables jusqu’à la semaine 48.
« Ces premiers résultats de phase I sont prometteurs : le vaccin CD40.HIVRI.Env a montré à la fois sa sécurité et sa capacité à induire des réponses précoces, puissantes et durables, rapporte le Pr Yves Lévy, directeur du VRI. Les différents anticorps produits et l’activation de lymphocytes T CD4+ polyfonctionnels ont été associés à un risque réduit d’infection par le VIH dans un précédent essai vaccinal, le RV144. Toutefois, à ce stade précoce de développement du vaccin, il est important de rappeler que les volontaires doivent continuer à se protéger de tout risque d’infection par le VIH, l’efficacité du vaccin n’étant évaluée qu’en phase II/III. »
« Cette nouvelle manière d’administrer la protéine d’enveloppe du VIH en la ciblant directement sur les cellules dendritiques pourrait jouer un rôle déterminant dans les stratégies combinant les schémas vaccinaux, en particulier à base de protéine Env, visant à induire des réponses durables », précise le Pr Giuseppe Pantaleo, co-investigateur de l’essai au Centre Hospitalo Universitaire de Lausanne.
L’équipe poursuit le suivi des volontaires pendant 12 mois. La 2e étape de l’essai se poursuit avec des groupes supplémentaires de volontaires ayant reçu le candidat vaccin CD40.HIVRI.Env associé à un autre vaccin actuellement en développement en phase II/III. Ce dernier, le « DNA-HIV-PT123 », est un vaccin à ADN qui pourrait amplifier la réponse immunitaire.
Essai de phase I : la première phase d’un essai clinique vise à évaluer la non-toxicité du traitement ou du vaccin testé. La phase II cherche à démontrer son efficacité et la dose optimale, tandis que la phase III compare son efficacité à un placebo ou à un traitement ou vaccin de référence s’il existe.
Le Vaccine Research Institute (ou VRI) est labellisé « laboratoire d’excellence » par l’État français et a été établi en 2011 par l’ANRS et par l’Université Paris-Est Créteil (UPEC) afin de conduire des recherches visant à accélérer le développement de vaccins efficaces contre le VIH/sida.
Anticorps monoclonal : les anticorps sont des protéines fabriquées par les cellules du système immunitaire. Les anticorps monoclonaux sont des anticorps fabriqués en laboratoire à partir d’un clone de cellule. Ils ont la capacité de reconnaître et de cibler spécifiquement certaines cellules.
Cellules dendritiques : cellules sentinelles réparties dans tout l’organisme, ayant la capacité de déclencher une réponse immunitaire.
Immunogénicité : capacité à produire une réponse immunitaire.
Jean-Daniel Lelièvre (1,2), Christiane Moog (3), Aurélie Wiedemann (1), Christine Lacabaratz (1), Fabio Candotti (4), Melany Durand (1,5), Véronique Rieux (6), Lucile Hardel (1,5), Alpha Diallo (6), Song Ding (7), Mireille Centlivre (1), Rodolphe Thiebaut (1,5,8), Giuseppe Pantaleo (4), Laura Richert (1,5,8), Yves Levy (1)
1. Vaccine Research Institute
2. CHU Henri Mondor, AP-HP, Créteil
3. Inserm UMR S1109 – université de Strasbourg
4. Centre hospitalier universitaire vaudois, Lausanne, Suisse
5. Inserm UMS 54 MART, université de Bordeaux
6. ANRS | Maladies infectieuses émergentes
7. EuroVacc Foundation, Lausanne, Suisse
8. Inserm U1219/Inria Sistm, université de Bordeaux
ANRS | Maladies infectieuses émergentes : information@anrs.fr
UPEC : media@u-pec.fr