La voie cGAS/STING est essentielle pour la détection d’un grand nombre de virus à ADN et à ARN, car elle déclenche de fortes réponses antivirales. Le rôle central de cette voie de détection innée est attesté par la grande diversité des stratégies que les virus ont choisies au cours de l’évolution pour entraver cette voie. Chaque étape de cette voie est ciblée par de nombreuses protéines virales pour empêcher son bon fonctionnement.
En étudiant la protéine GAS7 dans les macrophages infectés par le VIH, nous avons récemment réalisé qu’elle est dotée de propriétés régulatrices de la voie cGAS/STING à la fois à l’état basal et lorsque les macrophages sont exposés au VIH-1 et -2. Les effets observés sont frappants au niveau protéique et transcriptionnel, attestant de l’importance de cette régulation. GAS7 est spécifiquement exprimé dans les macrophages mais absent des lymphocytes T. Malgré son rôle central dans la détection des pathogènes et dans d’autres processus biologiques, la régulation de STING demeure mal connue.
Notre objectif général est d’étudier dans les macrophages primaires la protéine GAS7 pour son rôle régulateur de la voie cGAS/STING à l’état basal et pendant une infection chronique comme celle du VIH-1. Nous voulons déterminer quels autres gènes sont soumis à cette régulation par GAS7 et déchiffrer les mécanismes impliqués.
Notre projet s’articule autour de 3 objectifs.
1) Impact de l’expression de GAS7 dans les macrophages sur la réponse au VIH-1 et à l’état basal. Nous effectuerons des analyses RNAseq non biaisées de macrophages primaires exposés ou non au VIH-1 et traités ou non avec un shRNA GAS7. Nous déterminerons ainsi l’étendue des gènes dont l’expression est affectée par la modulation de GAS7. Cette analyse devrait également nous fournir une image complète de la réponse des macrophages au VIH-1 et de la manière dont cette réponse est affectée par l’expression de GAS7.
2) Mécanisme(s) de régulation de la machinerie cGAS/STING par GAS7. La spécificité du mécanisme médié par GAS7 sera testée en utilisant d’autres virus que les HIV-1 et -2 et d’autres stimuli de la voie. Nos données suggèrent que GAS7 régule l’immunité antivirale au niveau de l’ARNm. Cependant, le mécanisme reste flou. Nous avons découvert par protéomique que GAS7 se lie à plusieurs membres de la machinerie de l’épissage/processing des ARN et que GAS7 était présent dans le noyau des macrophages. De plus, nous montrons que l’activation de STING favorise la translocation de GAS7 vers le noyau. Nous supposons que GAS7 peut réguler l’expression de STING et d’autres facteurs antiviraux au niveau épigénétique ou en agissant sur l’épissage, le processing ou le transport de leurs transcrits. Pour tester ces hypothèses, nous utiliserons des approches à l’échelle du génome, telles que l’analyse ATAC-seq afin d’évaluer les changements dans l’accessibilité de la chromatine. Des analyses par RNAseq total permettrons de quantifier les ARN épissés ou non, en présence ou en l’absence de GAS7. Nous pourrons ainsi déterminer si GAS7 exerce une régulation au niveau de l’épissage/du traitement des ARNm. Enfin, nous devrions être en mesure d’identifier, parmi les interactants de GAS7, un ou quelques acteurs clés impliqués dans ce nouveau type de régulation afin d’en élucider le mécanisme.
3) Une analyse structure/fonction de GAS7. En combinant l’édition de gènes avec la transduction lentivirale d’une collection de constructions dérivées de GAS7 et de mutants que nous avons déjà construits, nous déterminerons quelles régions de la protéine sont nécessaires pour les phénotypes observés, à savoir la translocation nucléaire et la mise en place d’une réponse innée.
Notre projet s’appuie sur quantité de solides résultats obtenus avec des différences importantes dans les effets observés, justifiant sa faisabilité. Le décryptage du mécanisme de ce nouveau type de régulation de la voie critique cGAS/STING aura certainement de nombreux prolongements.