Cette étude vise à renforcer la préparation et la communication sur les risques pour améliorer l’adoption de mesures de protection par le public sur la fièvre hémorragique Crimée-Congo (FHCC), une fièvre hémorragique qui représente un risque imminent aux marges européennes. Pour ce faire il entend étudier de manière comparative la production, traduction et interprétation du savoir scientifique concernant la FHCC. Qualifiée tantôt comme « un problème à venir » en France et comme « une bombe à retardement » en Europe, la FHCC a été répertorié comme une menace pour la santé mondiale par l’OMS dans la liste des priorités pour la recherche et le développement en 2018. De nombreuses études sur le FHCC ont été réalisées par des chercheurs biomédicaux et écologiques. Toutefois, à ce jour, il n’existe aucun travail de sciences sociales sur cette menace, et un seul article SHS révisé par des pairs traite de la FHCC. Sans une éducation à la santé, une communication sur les risques et un engagement du public efficaces, la France et l’Europe ne sont pas préparées à faire face à une épidémie.
Cette étude rassemble des anthropologues, des historiens, des spécialistes des tiques, des épidémiologistes sociaux, des virologues, des politologues et un programme de science citoyenne sur quatre terrains situés aux frontières de l’Europe (France, Espagne, Roumanie, Turquie) et présentant différents niveaux de risque d’épidémie. Notre objectif est double. Tout d’abord il s’agit d’apprendre de la comparaison de ces quatre pays où la FHCC s’inscrit dans des temporalités et des géographies différentes. Ensuite il s’agit de de développer des outils d’éducation à la santé et de communication des risques adaptés pour se préparer aux épidémies et les prévenir.
Afin de co-construire des modules d’éducation à la santé, de communication sur les risques et de préparation avec l’ensemble des acteurs, nous mobiliserons l’approche « Conception axée sur le comportement » et la communication sur la santé comme cadre général de cette étude. Nous suivrons ainsi le processus élaboré pour développer un programme efficace de changement de comportement. Dans chaque site de l’étude, nous développerons une recherche ethnographique et historique formative, participative et multi-échelle. Nous explorerons les connaissances scientifiques produites, en accordant une attention critique aux concepts clés utilisés par les chercheurs et en identifiant les questions négligées. Nous examinerons ensuite la traduction des connaissances identifiées par les acteurs locaux en politiques de surveillance et de prévention, ainsi qu’en communication des risques par l’intermédiaire des médias et des autorités de santé publique. Nous évaluerons ensuite l’interprétation locale des politiques de surveillance et de prévention, ainsi que les “biologies situées” sur le terrain, en examinant les interactions entre homme, tique, animal, en le cas échéant, agent pathogène en fonction du contexte de l’interaction (dans la nature, dans l’espace domestique, productif, de soin) et du statut des acteurs (profession, socio-économique, soignant, soigné).
Nous partagerons nos conclusions localement dans le cadre d’ateliers avec les représentants communautaires, les autorités et d’autres parties prenantes dans chaque site de l’étude, en incitant ces participants à co-développer des recommandations pour de meilleurs plans de préparation, d’éducation à la santé, et de communication sur les risques. Nous tiendrons 2 ateliers rassemblant des chercheurs spécialistes de la FHCC et des représentants des autorités sanitaires nationales afin de présenter nos résultats et de favoriser le renforcement de la préparation à la FHCC et de l’éducation à la santé.
En nous fondant sur le résultat de ces interactions et avec le recours d’un expert en production de matériels pour l’éducation à la santé, nous développerons une boîte à outils de communication (affiches, bande dessinée, messages d’application, un MOOC) attrayante et adaptée à destination des groupes sociaux et professionnels à risque d’exposition aux tiques et au virus de la FHCC. Tous les éléments de la boîte à outils seront testés et évalués.