L’épissage alternatif (EA) est un processus cellulaire médié par un large complexe ribonucléoprotéique, le splicéosome, qui permet de générer à partir d’un ARN pré-messager un éventail d’isoformes d’ARNm. C’est est un moyen pour la majorité des gènes cellulaires d’étendre et de réguler leur expression.
Lors de l’infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH-1), le virus utilise ce processus d’EA pour générer, à partir d’un seul ARN pré-messager non épissé (unspliced, US), plus d’une centaine de transcrits viraux. Ce processus permet à la fois de réguler la production des ARNm US, qui seront soit traduits en protéines Gag et Gag-Pol, soit seront encapsidés dans les nouvelles particules en tant que génome viral, et la production des différentes isoformes d’ARN qui seront traduites en protéines virales nécessaires pour générer de nouveaux virus. Un déséquilibre dans ce processus peut avoir des conséquences importantes sur la réplication virale. l’EA du VIH est donc une étape particulièrement régulée, spatialement et temporellement, au cours de l’infection.
Déterminer les mécanismes moléculaires impliqués dans la régulation du transcriptome du VIH est donc crucial pour une meilleure compréhension de l’infection virale.
En exportant les ARN non-épissés (US) ou partiellement épissés vers le cytoplasme, la protéine virale Rev s’est révélée être un régulateur clé de l’expression du transcriptome viral. Les facteurs de régulation « classiques » de l’épissage tels que les protéine hnRNP ou les protéines SR ont également été très étudiées et jouent un rôle capital. Bien que son rôle soit controversé et les mécanismes impliqués ne soit pas clairs, certaines études suggèrent que la protéines virale Tat, le trans-activateur de la transcription du virus, pourrait également être impliquée dans la régulation de l’EA. Nos résultats préliminaires suggèrent en effet que Tat pourrait favoriser l’épissage de certaines isoformes virales et notamment ses propres isoformes, Tat 1 et Tat 2.
Cependant, il est de plus en plus clair que l’épissage alternatif est une étape extrêmement modulable, influencée par de nombreux processus cellulaires tels que la transcription, la traduction ou la dégradation des ARNm. L’importance de l’ensemble de ces processus sur l’EA et la production des isoformes virales au cours de l’infection a peu été étudiée, encore moins à l’échelle de l’ensemble du transcriptome du virus.
L’objectif de ce projet de recherche est de mieux caractériser l’ensemble des acteurs viraux et cellulaires qui interviennent dans la régulation de l’épissage alternatif lors de l’infection par le VIH-1. Ce projet s’articule autour de 2 axes :
1-Définir le rôle de la protéine virale Tat, le trans-activateur de transcription, dans la dynamique du transcriptome viral au cours de l’infection en caractérisant son impact sur l’ensemble du transcriptome viral et en définissant les mécanismes moléculaires impliqués.
2-Identifier et caractériser des nouveaux acteurs et processus cellulaires impliqués dans la régulation du transcriptome viral en utilisant une stratégie de criblage génomique par CRISPR/cas9 en présence d’un système rapporteur bi-chromatique de l’EA du VIH-1.
Ce projet repose sur une combinaison d’approches moléculaires et cellulaires (RT-qPCR, tests de complémentations, pontage et purification des complexes ARN-protéines, identification des facteurs cellulaires liés au pré-ARNm viral, etc..). De plus, un nouvel essai, récemment mis au point dans notre équipe et reposant sur le séquençage pleine longueur fournit un outil unique pour étudier la régulation de l’ensemble du transcriptome viral pendant l’infection.
Dans l’ensemble, ce projet de recherche nous permettra de mieux caractériser une étape clé de la réplication du VIH-1 et possiblement de proposer de nouvelles pistes thérapeutiques. Il permettra également d’améliorer nos connaissances générales sur un processus cellulaire qui régule l’expression de plus de 90% des gènes cellulaires humains.