La persistance de l’ADN viral dans les cellules est le principal obstacle à l’éradication du VIH. Les traitements antirétroviraux actuels inhibent uniquement l’initiation de nouveaux cycles complets de réplication, empêchant la production de virus par les cellules. Bien qu’ils soient capables de rendre le virus non infectieux, ils ne peuvent éliminer l’ADN viral.
Au cours d’un cycle normal de réplication du VIH, l’ADN linéaire non intégré (ULD) est synthétisé par transcription inverse de l’ARN génomique viral. Une fraction des ULD est importée dans le noyau où ils pourront soit s’intégrer dans le génome de la cellule, soit être sujets à des phénomènes de ligation, recombinaison et réparation formant des ADN circulaires qui ne contribuent que très peu à la réplication virale.
Lors de l’initiation d’un traitement antirétroviral sans inhibiteur de l’intégrase, la virémie plasmatique décroit selon deux phase. Une première rapide montrée comme étant due à des cellules productrices de virus à demi-vie courte et une seconde plus lente dont l’origine n’est à ce jour pas démontrée expérimentalement. En revanche, si le régime thérapeutique inclus un inhibiteur de l’intégrase virale, cette seconde phase n’est pas visible, suggérant alors qu’elle est en lien avec l’intégration.
Nous posons l’hypothèse qu’une proportion non négligeable des cellules infectées par le VIH héberge une ou plusieurs copies d’ULD avant l’initiation du traitement, une situation appelée latence pré-intégrative. Dans ces cellules, la production active d’ARN et de protéines du VIH doit attendre l’intégration de l’ADN viral, un processus qui peut se produire plusieurs jours ou plusieurs semaines après l’infection, selon la capacité de l’ULD à conserver son intégrité dans le temps. Cette intégration progressive serait à l’origine de la seconde phase de décroissance de la virémie chez les patients initiant un traitement ne comprenant pas d’inhibiteurs de l’intégrase.
Grâce au développement d’une nouvelle technologie ultra-sensible et à haut débit de quantification des ADN, (appelée DNA Ultra-Sensitive Quantification) nous avons récemment mis en évidence au laboratoire que les ULD ont une capacité de persistance bien supérieure à celle suggérée dans la littérature pouvant aller jusqu’à 3 mois dans des lymphocytes T CD4 quiescents. Nous proposons, chez des patients infectés par le VIH-1 diagnostiqués dès la primo-infection et initiant un traitement antirétroviral (essai national randomisé OptiPrim2), de suivre ex vivo l’effet du régime thérapeutique sur la dynamique des ULD au cours du temps (quantifiés par la technologie DUSQ) et, par une modélisation mathématique, de la corréler à la décroissance de la charge virale plasmatique mais également aux autres formes d’ADN viral (ADN VIH intégré, ADN VIH à 2-LTR, ADN total).
Cette étude pilote nous permettra pour la première fois d’initier une meilleure compréhension du rôle des ULD dans la dynamique de décroissance de la charge virale chez les patients initiant un traitement antirétroviral incluant ou non un inhibiteur d’intégrase. Par ce contrat d’initiation, nous pourrons donc obtenir des données sur 20 patients de chaque bras de l’essai Optiprim 2. Ces données seront de première importance et, en fonction des résultats générés, pourront permettre d’initier un projet de plus grande ampleur incluant plus de patients pour élaborer un modèle mathématique robuste.
Ces données préliminaires pourraient être de première importance pour initier un protocole chez le primate non humain pour identifier les sites et les cellules à l’origine d’une réplication virale résiduelle. De plus, les données accumulées dans ce contrat d’initiation pourront également être une base préliminaire à l’utilisation des ULD comme marqueur précoce du rebond viral dans les essais d’interruption de traitement antirétroviral, nécessaire dans les recherches de stratégies de cure.