Contexte
En dehors des séquelles objectivables d’un épisode sévère de COVID-19, la physiopathologie des symptômes persistant plusieurs mois après COVID aigue n’est pas établie. Nous faisons l’hypothèse qu’une partie substantielle de ces symptômes relève de troubles somatiques fonctionnels, définis par des symptômes non expliqués par une lésion de l’organe ou appareil qu’ils désignent mais relevant de mécanismes cognitifs et comportementaux modifiables, notamment par une activité physique adaptée. La fréquence de ces symptômes et leur retentissement majeur justifie le développement d’une offre de soins adaptée facilement accessible, impliquant en priorité la médecine générale. Ainsi, l’ARS a préconisé la mise en place de cellules d’appui « covid long » dont le rôle est de coordonner la prise en charge des patients souffrant de ces symptômes en leur donnant des conseils et en les orientant si besoin vers d’autres professionnels de proximité. L’expérience a montré que les médecins sont décontenancés par la symptomatologie très floride et ont souvent du mal à gérer l’anxiété des patients envers leurs symptômes.
Objectif principal
Evaluer l’efficacité d’une formation des médecins généralistes accompagnés par une cellule d’appui « covid long » (CACL), à la prise en charge des symptômes somatiques fonctionnels persistants attribués à la COVID-19 sur la qualité de vie des patients à 1 mois.
Méthodes
Essai randomisé contrôlé en stepped wedge : randomisation de l’ordre dans lequel les CACL recevront l’intervention. Après une phase d’observation, la formation des CACL se fera au même rythme que celui qui aurait eu lieu sans cette étude, durant 7 mois.
L’intervention comportera: 1) Formation délivrée au personnel des CACL et aux médecins généralistes volontaires : cours théoriques en ligne et capsules vidéos réalisées avec acteurs, discutées avec les apprenants, un médecin expert et un patient expert. 2) Remboursement pour chaque patient de 3 consultations longues (1 heure) avec un médecin généraliste participant et d’une évaluation par un enseignant en activité physique adapté.
Le critère de jugement principal sera l’évolution du score de qualité de vie SF-12 à 1 mois. Tous les critères de jugement seront évalués par entretien téléphonique à l’inclusion puis à 1 mois, 3 mois et 6 mois : composantes physique et mentale du SF-12, intensité des symptômes ; consommation de soins, arrêt de travail, satisfaction des médecins et vécu des patients.
Population d’étude : patients pris en charge par une des 13 CACL d’Ile de France.
Les critères d’inclusions seront : au moins deux symptômes attribués à la COVID-19 (incluant fatigue, dyspnée, troubles cognitifs ou douleur) ; persistant plus de 1 mois ; non expliqués par un diagnostic sans lien avec la COVID-19 ; à l’origine d’une altération de la qualité de vie jugée significative par le patient.
Analyse statistique
Afin de mettre en évidence une différence d’au moins 3.5 points de moyenne du score SF-12 avec une puissance de 98%, nous prévoyons d’inclure 56 sujets par CACL et 728 sujets au total. Le score moyen de SF-12 à 1 mois sera comparé entre les patients inclus avant ou après intervention, par un test de Wald Z. Une recherche de facteurs socio-économiques et cliniques influençant l’amélioration du SF-12 sera réalisée par régression linéaire mixte multivariée.
Résultats attendus et implications
Nous attendons à une amélioration plus rapide des patients après une intervention médicale précoce adaptée d’emblée aux troubles somatiques fonctionnels. En cas d’effet significatif de l’intervention sur le devenir des patients, les supports de formation pourront être facilement diffusés à l’ensemble des CACL et des médecins généralistes de France et ainsi améliorer la prise en charge des patients à l’échelle nationale. D’une façon plus large, cet essai permettra de faire reconnaitre l’importance d’une prise en charge adaptée des troubles somatiques fonctionnels dont la fréquence est majeure et ne cesse d’augmenter dans notre société, tandis que la prise en charge médicale devient de plus en plus technique et fragmentée.