C’est le 24 mars 1882 que le Dr Robert Koch a annoncé avoir découvert le bacille responsable de la tuberculose.
Dernière mise à jour le 11 avril 2024
Cette année est placée sous le thème « Oui ! Nous pouvons mettre fin à la tuberculose ! ». En 2024, l’accent est mis sur la concrétisation des engagements pris par les chefs d’état lors de la réunion des Nations unies tenue en 2023 pour éradiquer la tuberculose au plus vite.
Selon les estimations, 10,6 millions de personnes ont développé la tuberculose dans le monde en 2022 : 5,8 millions d’hommes, 3,5 millions de femmes et 1,3 million d’enfants. À l’échelle mondiale, la tuberculose est la deuxième cause de mortalité due à une maladie infectieuse, derrière la Covid-19 et avant le sida. Au total, 1,3 million de personnes sont mortes de la tuberculose en 2022 (dont 167 000 présentaient également une infection à VIH). Mettre un terme à l’épidémie de tuberculose d’ici à 2030 est l’un des défis sanitaires s’inscrivant dans le cadre des objectifs de développement durable des Nations unies.
La tuberculose multirésistante constitue une crise de santé publique et demeure une menace pour la sécurité sanitaire. Seules deux personnes atteintes de tuberculose pharmacorésistante sur cinq environ ont eu accès à un traitement en 2022.
Pour garantir les progrès en matière de réduction de la morbi-mortalité de la tuberculose, il est nécessaire de maintenir des niveaux de financement suffisants pendant de nombreuses années. L’ANRS MIE s’engage contre la tuberculose en finançant des projets de recherche et en animant des groupes d’action coordonnée composés d’experts du domaine.
A l’occasion de cette journée mondiale, l’ANRS MIE vous présente certains des travaux majeurs en cours, notamment ceux sur la prise en charge de la tuberculose chez la femme enceinte et le jeune enfant, ou encore la recherche de nouveaux antibiotiques à double-effet ou de molécules bio-inspirées pour lutter contre la tuberculose multirésistante.
En savoir plus sur l’action coordonnée TBLe développement des premiers antibiotiques entre 1940 et 1960 a très largement contribué à la lutte contre la tuberculose. Ont ensuite suivi 40 ans d’usage des mêmes molécules, sans qu’aucun autre antibiotique n’ait été identifié pour venir renforcer le traitement. Plusieurs de ces molécules sont encore en usage aujourd’hui, mais leur usage intensif associé à leur toxicité a favorisé l’émergence de bacilles tuberculeux (Mycobacterium tuberculosis aussi connu sous le nom de bacille de Koch) résistants aux antibiotiques. Après plus de 40 ans sans nouvel antituberculeux, le début du 21e siècle a vu un regain massif d’effort de recherche dans ce domaine, avec l’identification de trois nouvelles molécules (bédaquiline, pretomanid et delamanide). Ceci a permis l’élaboration de nouvelles combinaisons thérapeutiques efficaces contre la tuberculose multirésistante aux anciennes générations d’antibiotiques. Davantage de molécules sont cependant nécessaires pour permettre aux médecins d’adapter le traitement en fonction du profil clinique des patients. Le pipe-line de molécules en test clinique est à ce jour relativement riche, mais il faut éviter de crier victoire, tant les étapes permettant à ces molécules d’accéder un jour à la pharmacopée générale restent complexes et sélectives. En outre, de nombreux efforts restent à faire pour permettre de réduire la durée du traitement, aujourd’hui encore trop long, et pour limiter les risques de rechute. Il est ainsi nécessaire de rechercher et d’explorer en permanence de nouveaux modes d’action antibactériens.
Parmi les nouvelles approches thérapeutiques en cours d’exploration, on peut citer les molécules dites « anti-virulence », les molécules stimulant les défenses de l’hôte, les molécules inhibant la dormance bactérienne, source de rechute, les molécules stimulant l’action d’autres antibiotiques (ou « boosters »), et les molécules bloquant des pompes d’efflux d’antibiotiques. Les antibiotiques à double effet vont cumuler au moins deux de ces mécanismes. C’est le cas par exemple de la bedaquiline qui, en plus de bloquer la production d’énergie (ATP) de la bactérie, stimule l’immunité innée de l’hôte infecté, favorisant l’élimination du bacille par deux mécanismes indépendants.
Dans cette publication (1), à laquelle a participé l’équipe d’Alain Baulard à l’Institut Pasteur de Lille, le double effet de la molécule consiste à détenir à la fois la capacité de rendre la bactérie hyper-sensible à l’antibiotique éthionamide, même les bactéries résistances à cet antibiotique, et de bloquer la virulence de la bactérie en l’empêchant de sécréter les protéines EsxA et EsxB, très délétères pour le système immunitaire du malade.
A l’instar de la bedaquiline, cette molécule illustre comment un composé présentant une structure chimique relativement simple peut agir selon deux mécanismes d’action indépendants. Il est à parier que le bacille de la tuberculose puisse avoir plus de difficultés à trouver une parade pour se mettre à l’abri de cette double action, limitant ainsi les risques d’émergence de résistance, le cauchemar des thérapeutes et de leurs patients.
(1) Gries R, Chhen J, van Gumpel E, Theobald SJ, Sonnenkalb L, Utpatel C, Metzen F, Koch M, Dallenga T, Djaout K, Baulard A, Dal Molin M, Rybniker J. Discovery of dual-active ethionamide boosters inhibiting the Mycobacterium tuberculosis ESX-1 secretion system. Cell Chem Biol. 2023 S2451-9456(23)00436-1.