De nouvelles stratégies sont nécessaires pour réduire la mortalité des patients infectés par le VIH atteints de tuberculose (TB) méningée (TBM), qui atteint 50 à 70% malgré le traitement anti-tuberculeux (TAT). L’excès d’inflammation est un mécanisme important de sévérité de la TBM. Les corticoïdes sont recommandés à fortes doses pendant les 6 à 8 premières semaines du TAT chez les patients VIH-négatifs. Les anti- TNF ont été utilisés pour traiter le syndrome de restauration immune (IRIS) sévère chez quelques patients atteints de TB, mais aucun essai clinique n’a jusqu’ici évalué l’impact de cette stratégie sur la mortalité de la TBM au cours de l’infection à VIH. L’adalimumab est recommandé pour traiter les maladies inflammatoires de l’intestin ou la polyarthrite rhumatoïde.
Notre objectif principal est d’évaluer l’impact sur la mortalité à 9 mois de l’ajout de l’adalimumab au TAT pendant 12 semaines chez les patients infectés par le VIH et atteints de TBM. Les objectifs secondaires incluent la comparaison des 2 stratégies en termes de survenue d’infections sévères sur les 3 premiers mois de suivi, de séquelles neurologiques et de morbidité sévère à 9 mois (effets indésirables de grade 3 et 4), d’évolution biochimique et microbiologique du liquide céphalo-rachidien (LCR), de succès virologique et immunologique sous antirétroviraux (ARV) à 9 mois, évolution des biomarqueurs inflammatoires et des cytokines dans le plasma et le LCR.
Tous les adultes infectés par le VIH, naïfs d’ARV, avec une TBM se verront proposer de participer à cette étude 0 à 3 jours après le début du TAT et des corticoïdes. Les principaux critères d’exclusion seront des infections neurologiques concomitantes, une TB résistante à la rifampicine et la grossesse.
Les patients seront randomisés (1 :1) pour recevoir un traitement standard (TAT aux doses standard avec de fortes doses de dexaméthasone), ou un traitement standard + adalimumab (une injection sous-cutanée de 40 mg d’adalimumab toutes les 2 semaines de S0 à S10 ; 6 injections). Les ARV seront introduits après 4 semaines (et 8 semaines au maximum) de TAT dans les deux bras.
Les visites de suivi, seront organisées à S2, S4, S6, S8, S10 pour permettre les injections d’adalimumab puis à S12, M6 et M9 du TAT, et incluront une évaluation clinique, des prélèvements sanguins usuels (+ LCR à S0, S4 et S10), une biothèque (plasma+ LCR à S0, S4 et S10), des tests de grossesse chez les femmes en âge de procréer.
L’innocuité en termes d’infections sévères sera surveillée par la notification en ligne des événements indésirables graves avec observation clinique détaillée, la validation à distance par un comité international d’évaluation des événements, l’accès en temps réel du comité indépendant de surveillance (CIS) et revue des analyses intermédiaires par le CIS. Les inclusions seront temporairement interrompues après 40 patients pour permettre une analyse intermédiaire et la validation de la poursuite de l’essai par le CIS.
63 patients seront randomisés dans chaque bras pour tester l’hypothèse nulle d’une proportion de survie <50% contre l’hypothèse alternative d’au moins 70% de survie à 9 mois, avec une erreur de type I unilatérale de 10% et une puissance de 80% dans le bras intervention. La mortalité sera évaluée dans le bras contrôle avec une précision de 12%. Les données de tolérance seront analysées par le comité indépendant par tranches de 10 patients inclus dans le bras adalimumab de façon à pouvoir détecter des effets délétères du traitement.
Ce projet pourrait débuter mi 2020 au Vietnam, Brésil et Mozambique. Le projet dans son ensemble durera 3,5 ans pour une durée totale de l’essai de 27 mois (2,25 ans).
Cet essai clinique est une étude de preuve de concept d’une approche innovante pour réduire la mortalité chez les patients infectés par le VIH atteints de TBM. Cette étude randomisée de phase II permettra de valider l’approche proposée chez un petit nombre de patients avant d’envisager une étude de phase III qui permettra de confirmer les résultats. Le contexte de mise à disposition de biosimilaires des anti-TNF ouvre des perspectives d’accès à ce traitement dans de nombreux pays.
Demandeur
DE CASTRO Nathalie / BHATT Nilesh
Type de financement
Projet de recherche